| Publié le 24.07.2018  | 


Comment décider sans se tromper ?

Introduction

Après avoir traité des décisions stratégiques dans notre avant dernière Newsletter et commencé à aborder le sujet des prises de décisions tactiques ou opérationnelles dans notre dernière Newsletter, nous allons continuer aujourd’hui à développer cette thématique.

Pour ce faire, nous vous proposons de suivre les 9 étapes que nous avions évoquées le mois dernier.
Nous avions déjà traité les 3 premières étapes, que vous aviez pu mémoriser avec l’acronyme T.E.A :

- Le Temps : De combien de temps disposez-vous ?
- Les Enjeux : Quels sont vos enjeux personnels et professionnels ?
- Les Acteurs : Quels sont les acteurs impliqués dans votre processus de décision ?

Nous allons aborder aujourd’hui les 4 suivantes, à savoir :

- Les Options : Quelles sont vos meilleures options ?
- Les Risques : Comment analyser vos risques ?
- Les Freins : Quels sont vos freins et obstacles ?
- Les Peurs : Quelles sont vos émotions et vos peurs ?

Et enfin, finaliser votre processus décisionnel avec les 2 dernières étapes, à savoir :

- Visualisez votre décision
- Validez votre décision avec la méthode de l’expérience optimale

1.- Etape n° 4 - Les Options : Quelles sont vos meilleures options ?

Une fois que vous avez identifié vos principales options, il est souhaitable de réduire votre nombre d’options à deux ou trois. Vous construisez ensuite un tableau à 3 colonnes, avec une colonne par option.

Ensuite, vous pouvez définir vos critères de choix, avec une échelle de notation de 1 à 5, par exemple. Par convention, vous attribuerez une note positive aux critères constituant un avantage pour l’option étudiée et une note négative aux critères représentant un inconvénient pour l’option analysée.

Puis, vous procédez à la notation de chaque option, critère par critère, en prenant en compte l’importance relative de chaque critère, ce qui vous amène à établir une pondération, et à calculer la note pondérée que vous attribuez à chaque critère.

Enfin, vous procédez à l’addition des notes, pour chaque colonne, c’est-à-dire pour chaque option.

L’option qui obtient le meilleur score est celle que vous allez choisir.

Que pensez-vous de cette méthode ?

- Si vous êtes très rationnel, elle sera peut-être de nature à vous rassurer.
- Si vous aimez vous connecter à votre intuition pour décider, elle ne sera pas satisfaisante pour vous.

Pour vous raccrocher aux concepts des neuroscientifiques, ils vous expliqueront, notamment Daniel Kahneman dans son
ouvrage «Système 1 / Système 2 : Les deux vitesses de la pensée », que nous disposons tous d’un cerveau lent dit
rationnel qui est capable de prendre des décisions logiques sous 3 conditions :

- Etre motivés à ne pas nous tromper
- Investir de l’énergie
- Disposer de temps

Il me semble donc intéressant de procéder à cette analyse rationnelle des options en présence même si vous ne prendrez pas votre décision uniquement en fonction des résultats de cette analyse multi critères.

2.- Etape n° 5 - Les Risques : Quels sont vos risques et comment les gérer ?

Avant d’aborder la méthodologie à suivre pour analyser les risques, demandez-vous d’où viennent vos risques et quels
sont-t-ils ?


Dans votre environnement qui devient de plus en plus complexe, vous souhaitez vous-mêmes et vos équipes devenir de plus en plus agiles et créatives.
Cela vous amène à prendre davantage de décisions avec de moins en moins d’informations, donc en mobilisant votre cerveau rapide, capable de prendre des décisions automatiques, très rapidement et sans effort, ce qui peut augmenter vos risques d’erreur, risques qui ont un coût pour vous, vos équipes et votre entreprise.

Comment réduire ces erreurs ?

Nous le verrons lors de l’étape N° 7, dédiée à la prise en compte de vos émotions et à l’analyse de vos peurs.

Concernant la méthodologie d’analyse des risques, vous pouvez suivre une méthode assez classique qui consiste à :

  • - Lister tous les risques liés à votre prise de décision

Et pour chacun d’entre eux, identifier :

  • - La probabilité d’occurrence
  • - L’intensité du risque


Par exemple, lorsque j’ai lancé mon projet de transformation d’une filiale du Groupe CWT dans un pays d’Amérique Latine :

  • - Le premier risque était la démotivation des équipes lié à la mauvaise situation de la filiale et au démarrage de mon plan de licenciements.
  • - La probabilité d’occurrence était très forte, proche de 100%
  • - En revanche, je pouvais agir sur la variable « intensité de la démotivation » des équipes avec des mesures adaptées comme :

o Une communication régulière aux équipes du siège, mais aussi aux équipes opérationnelles en me déplaçant dans les régions

o Une communication transparente, en annonçant rapidement le nombre de licenciements

o Un message positif, en communiquant de manière simple, claire et précise sur ma vision d’entreprise à 3 ans et au-delà

o Une communication des bénéfices de la mise en œuvre de cette vision :

      • Pour l’entreprise
      • Pour les salariés

3.- Etape n° 6 – Les Freins : Quels sont vos freins à la décision et comment les surmonter ?

Parmi les freins que nous retrouvons souvent dans la prise de décisions, je peux mentionner :

  • - L’envie d’être exact
  • - Le désir de ne pas se tromper
  • - L’absence d’informations suffisante pour nous sécuriser dans notre prise de décisions
  • - Le manque de fiabilité de l’information
  • - La multitude de sources d’informations et la surabondance de l’information
  • - Le manque d’échange et de confrontations de points de vue
  • - Le manque d’outils de facilitation de la prise de décisions
  • - Le manque d’objectifs et de critères de décision
  • - Le manque de courage managérial

Après avoir identifié vos freins dans la décision que vous devez prendre, focalisez-vous sur les principales :
J’identifie, par exemple que mon premier frein est ma volonté de ne surtout pas me tromper dans cette décision importante :

Comment surmonter ce frein que nous retrouvons dans toutes les décisions importantes ?

Paradoxalement, plus j’ai eu une volonté forte de ne pas me tromper, plus cela m’empêche de sortir de ma zone de confort et d’accepter de prendre des risques, notamment le risque inhérent à toute prise de décision, risque que je peux mesurer et limiter en adoptant les bonnes pratiques décrites dans l’étape 5

Hormis le frein généralisé consistant en la peur de me tromper, j’identifie maintenant mes trois principaux freins, le premier pour moi résidant dans le manque d’informations pour sécuriser ma prise de décisions, c’est le cas notamment le cas lors des réunions de mon comité de direction.
Normalement, je souhaiterais que chaque sujet abordé lors de mes CODIR fasse l’objet d’une prise de décision et d’un plan d’actions, mais ce n’est pas toujours le cas.

=> Comment surmonter ce premier frein ?

Nous ne pouvons pas décider si nous n’avons pas rassemblé l’information préalable nécessaire à la prise de décision. C’est pourquoi certaines décisions sont reportées à une prochaine réunion, d’où une perte de temps et d’efficacité. Pour surmonter ce problème, il suffit que vous décidiez que chaque participant vienne avec une information la plus complète possible, factuelle et pertinente.

Ensuite, après avoir confronté les solutions possibles au vu de l’information disponible, il vous incombe de décider en ayant présent à l’esprit que la vitesse de l’action prime de plus en plus souvent sur l’exactitude de l’action.

=> Mon deuxième frein consiste une confrontation insuffisante de points de vue : comment surmonter ce frein ?

L’absence de confrontation de points de vue aboutit souvent à la frustration des participants à la réunion et les décisions qui en découlent sont fragiles.

Pour surmonter ce problème, vous pouvez adopter les bonnes pratiques suivantes :

  • - Fixer le temps que vous allouez à la prise de décision
  • - Garantir l’expression et la liberté de parole de chaque participant
  • - Enfin, accepter, voire susciter une saine et créative friction entre les managers présents et leurs points de vue. Plus ces points de vue exprimés seront différents, plus la prise de décision qui suit sera pertinente

=> Mon troisième frein réside dans le manque d’objectifs et de critères pour décider.

Pourquoi est-ce un frein important et comment le surmonter ?

Tout d’abord, prenons conscience qu’une décision n’est jamais bonne ou mauvaise en soi.
Une décision est bonne ou mauvaise en fonction de l’objectif que l’on poursuit.

Il convient donc de clarifier au préalable l’objectif poursuivi, c’est-à-dire l’objectif que votre décision doit servir ainsi que les critères qui vous permettront de déterminer si votre décision est bonne ou mauvaise.

Ainsi, lors de ma prise de poste comme directeur d’une filiale étrangère d’un groupe international, les 2 objectifs majeurs que j’avais fixés à mes équipes étaient la satisfaction clients et l’amélioration de la productivité auquel j’ai rajouté ensuite le développement commercial.

Ces 3 objectifs très clairs avaient le mérite de donner une orientation précise qui permettait à l’ensemble des managers de mieux prendre leurs décisions, de manière plus autonome et responsable, de faire converger les efforts tout en autorisant une réduction des efforts en matière de reporting et de contrôle.

Ces efforts se sont révélés gagnants et ont permis non seulement d’atteindre ces objectifs mais également de réduire rapidement les pertes de cette filiale puis d’améliorer progressivement son niveau de rentabilité.

4.- Etape n° 7 – Les Peurs : Quelles sont vos émotions, vos peurs et comment les gérer ?

Cette étape de reconnaissance de vos émotions et notamment de vos peurs est souvent omise dans les processus de décision en entreprise et pourtant elle est essentielle pour réussir vos prises de décisions et pour réduire vos possibilités d’erreur.


Intégrer vos émotions dans vos prises de décisions augmente indéniablement vos chances de succès mais comment réussir à le faire sachant que les émotions sont rapides et nous n’y avons pas toujours accès.

Je vous propose pour y parvenir, de suivre ce processus en 3 points :

  1. Reconnaitre les émotions qui sont en jeu chez vous en lien avec la décision que vous devez prendre

    Pour ce faire, il convient de mettre votre « mental » en mode « pause » et l’un des moyens d’y parvenir est de vous accorder quelques minutes de calme, sans rien faire que de respirer en focalisant votre attention sur votre respirations et sur vos ressentis physiques liés à vos émotions.

  2. Identifier et nommez vos émotions

    Ce démarrage d’une connexion consciente à votre corps et à vos pensées devrait vous permettre de commencer à reconnaitre vos émotions.
    Vous continuez ensuite en nommant les émotions que vous venez de reconnaitre.
    Sachez que l’émotion que vous venez d’identifier est un très bon indicateur de votre ressenti interne par rapport à la décision que vous devez prendre dans un sens ou dans l’autre, et des actions qui suivent derrière.

    - Si vous avez identifié de la joie, vous pouvez passer directement au point 4.
    - Si vous avez identifié des peurs, passez d’abord au point 3

Nommez vos peurs et comprendre ce qui les déclenche

Est-ce que vous avez peur de :

- Ne pas pouvoir assumer votre décision ?
- Ne pas être à la hauteur ?
- Ne pas être suffisamment compétent ?
- De manquer de ressources dans la mise en place de votre décision ?
- D’être critiqué et rejeté par vos équipes ?
- De perdre dans le déploiement de votre décision ?
- De réussir et de ne pas pouvoir assumer votre succès ?

Supposons que vos peurs principales soient :

- Ne pas être à la hauteur
- Peur de perdre
- Peur d’être rejeté

Comment surmonter vos peurs et aller de l’avant ?

  1. Vous pensez ne pas être à la hauteur de la situation, une fois votre décision prise

    Cette peur peut être très paralysante
    Et plus vous avez pris l’habitude de rester dans votre zone de confort, plus cette peur va se renforcer
    Et plus vous faites un peu plus de la même chose, plus vous obtiendrez les mêmes résultats insatisfaisants pour vous.
    Pour lever cette peur, il est souhaitable de d’oser sortir de votre zone de confort et de tenter de nouvelles choses.
    Ce principe est simple à énoncer mais peut s’avérer compliqué à mettre en pratique.
    Si vous n’y arrivez pas par vous-même, n’hésitez pas à demander de l’aide dans votre entourage ou auprès de professionnels de l’accompagnement. Les bénéfices que vous obtiendrez de cette démarche seront largement supérieurs au coût éventuel.

  2. Vous pensez que vous allez perdre quelque chose d’important pour vous en prenant cette décision.

    Ce qui est certain est que plus vous allez vous focaliser sur la peur de perdre, plus vous allez effectivement perdre à plus ou moins court terme.
    Pour surmonter cette peur, il convient de passer à l’étape 8 et de prendre le temps dont vous avez besoin pour pouvoir visualiser votre victoire. De nombreux exercices permettent d’arriver dont certains sont surprenants par leur puissance.

  3. Vous pensez que vous allez être rejeté par vos équipes après la décision

    Sachez que dès lors que vous commencez à avoir du succès, vous pouvez devenir la cible de votre entourage.
    Sachez également que plus votre niveau de confiance en vous est élevé, moins vous serez sensible à ces critiques et mieux vous pourrez vivre avec et réussir malgré ces critiques.
    Sur ce point également, n’hésitez pas à demander de l’aide si vous en ressentez le besoin, l’essentiel étant d’arriver à atteindre vos objectifs tout en prenant du plaisir sur le chemin du succès et sans oublier de célébrer votre succès avec vos équipes, une fois l’objectif atteint

 

5.- Etapes n° 8 et 9
Visualisez votre décision
Validez votre décision avec la méthode de l’expérience optimale

Ces deux dernières étapes sont essentielles pour finaliser avec succès votre processus décisionnel.
Afin de ne pas alourdir cette newsletter, je ne les développerais pas ici.
Vous pouvez nous contacter via notre site web si vous êtes intéressés pour en savoir plus et nous nous ferons un plaisir de vous répondre.

Conclusion

Décider uniquement au vu de critères rationnels tel que nous l’avons décrit dans l’étape 4 s’avère chaque jour plus difficile.

En effet, notre environnement devient de plus en plus complexe et incertain, ce qui augmente notre risque de faire des erreurs de jugement si nous ne croisons pas nos méthodes de prise de décisions en nous connectant aussi à nos émotions et à notre intuition.

Notre cerveau étant par essence aversif aux risques, nous devons avoir conscience que cela peut générer des biais cognitifs dans nos organisations.

Cette aversion aux risques peut également favoriser l’émergence de profils de manager excessivement prudents et conformistes.

En effet, face à une complexité grandissante, les avancées des neurosciences nous aident à mieux comprendre comment notre cerveau décide (Cf. l’une de nos précédentes newsletters sur DYNASTRAT et sur les biais émotionnels et cognitifs impactant nos décisions).

Au-delà de l’aversion aux risques et aux pertes, lorsqu’un manager est sous l’influence d’un biais cognitif, il peut avoir tendance à surévaluer les bénéfices immédiats ou à se soumettre trop facilement à l’opinion des figures d’autorité ou à reporter trop rapidement sa décision lui évitant ainsi une prise de risque.

Avec votre responsabilité de dirigeant, si vous ne vous impliquez pas , personnellement, sur le sujet de la culture décisionnelle, vous risquez de voir apparaître dans votre entreprise les 3 profils de manager suivants :

  • - Le manager évitant
    Il fait l’autruche face aux problèmes pour ne pas avoir à décider comment les régler.

  • - Le manager hyper contrôlant
    Il cherche à recueillir toute l’information disponible avant de décider pour réduire le risque d’erreurs.

  • - Le manager impulsif
    Il fonce directement dans l’action sans prendre le temps de la prise de recul au risque de se rendre compte
    rapidement que la direction prise n’est pas la bonne.


En qualité de dirigeant, l’une de vos décisions importantes porte donc sur la nature de la culture décisionnelle que vous voulez développer dans votre entreprise. Ce choix représente dès aujourd’hui et surtout demain, un enjeu majeur de performance et de compétitivité.

Afin de réduire l’impact du biais de l’aversion aux risques, vous pouvez commencer à inscrire dans l’ADN de votre entreprise un véritable droit à l’erreur au niveau individuel et collectif, étant entendu que ces erreurs ne sont ni volontaires ni répétitives.

Une fois que ce droit à l’erreur fait partie de votre culture décisionnelle, vous pouvez renforcer votre avantage compétitif en développant la capacité de vos managers et de vos équipes à apprendre autant de leurs erreurs que de leurs réussites.

Pour ce faire, l’une des pistes d’action que je vous propose réside dans la mise en place systématique d’un retour d’expérience sur tous vos projets afin d’en tirer un enseignement maximal et de capitaliser sur vos bonnes pratiques.

Thierry et moi-même vous souhaitons un très bel été.
Au plaisir de vous retrouver à la rentrée !

 

 

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